Un voyage à travers le temps et le terroir
Le site abrite des vignes depuis environ 300 ans, comme l'atteste une carte de 1707. Les origines de la culture de la vigne remonteraient à l'époque médiévale.
La preuve de la vocation agronomique de Saint-Seurin-de-Cadourne est apportée par la première carte moderne précise de notre histoire, celle de Claude Masse. Elle montre un territoire entièrement cultivé, situation exceptionnelle en Médoc, à l'exception des palus, consacrés à l'élevage.
La carte montre clairement qu'au début du 18ème siècle, un an avant la naissance des Nouveaux Clarets français et juste avant le grand hiver 1709, la majeure partie de l'actuel vignoble de Château Charmail était cultivée.
XVIe SIÈCLELes Origines
L’histoire connue remonte au 16° siècle, en 1520. Les plus anciens bâtiments présents sur la propriété sont ceux de l’ancienne seigneurie de Bardis, dont font partie les Châteaux Verdus et Bardis. En 1612 apparait la famille Trevey, qui va hériter de Bardis en 1612, et dont les héritiers resteront propriétaires jusqu’au 18° siècle.
La culture de la vigne date de cette époque, et il aura fallu du temps pour comprendre toutes les subtilités et les atouts de cette terre. Terre sauvage, de caractère et de liberté, la devise des Trevey de Charmail sera « Charmail suis, au diable le reste ! », comme si plus rien ne comptait quand on se trouve à contempler la beauté et la quiétude de ces lieux.
Les noms des bâtiments vont changer au fil du temps, changer de mains, et subir plusieurs modifications. Finalement c’est le Château Charmail, et son château carré du 19° siècle, qui tire son épingle du jeu. Autour d’une vingtaine d’hectares, la qualité de son terroir et de sa production lui apportera l’ascendant nécessaire pour prendre la main sur les terroirs d’origine.
1982 La Renaissance
Propriété de familles successives dont les familles Fabiani et Laly, c’est en 1982 qu’un jeune agronome découvre Charmail et va en faire un vignoble de premier rang. Olivier Sèze, reprend d'abord une dizaine d’hectares et va travailler sans cesse à l’amélioration de la santé de la vigne. Il développe harmonieusement les quatre cépages qui sont cultivés, avec notamment une approche visionnaire du potentiel du Petit Verdot. Il va étendre le vignoble et comprendre à force de travail les particularités du lieu et les moyens d’en tirer le meilleur.
Millésime après millésime, et pendant près de 30 ans, il développe aussi une vinification innovante et délicate qui révèlele magnifique terroir de Charmail. Son engagement sans failles va propulser la propriété dans l’antichambre des premiers crus qui sont ses voisins.
2008La Consécration
Bernard d’Halluin, un « Chti » élevé au Bordeaux, réalise son rêve de se lancer dans le vin. A la recherche d’une propriété dans le Bordelais, il a un véritable coup de foudre pour Charmail. Avec Olivier Sèze ils sont animés par la même passion, et ils vont former pendant 5 ans un duo complémentaire au service de Charmail et de ses vins.
Seul propriétaire jusqu’en 2021, Bernard d’Halluin rachète 6 hectares du vignoble d’origine, et entreprend de moderniser la propriété, avec beaucoup de sobriété et d’élégance. Il oriente la propriété vers une viticulture respectueuse de l’environnement, et développe en France comme à l’étranger, la notoriété du Château Charmail. Il a concrétisé 40 ans d’efforts et à fait de Charmail une référence à Bordeaux.
2012L'Art de l'Équilibre
Le jeune Sébastien Pineau arrive à la propriété en 2007, lui qui est fils de vigneron, originaire de la Loire. Il profitera d’un formateur exceptionnel en la période d’Olivier Sèze et d’un entrepreneur inspiré en la personne de Bernard d’Halluin qui lui donnera les moyens d’exprimer tout son potentiel.
Très vite autonome, il va encore améliorer les techniques de vinification et orienter l’élevage des vins de Charmail vers beaucoup de souplesse et d’équilibre. A la vigne, il défend le vivant et soigne la terre, qui est la condition première à l’expression pure de notre terroir. Sébastien Pineau est tout à la fois rigoureux et inspiré, et fait progresser Charmail par son travail incessant : son choix de questionner en profondeur les techniques traditionnelles bordelaises obtient des résultats merveilleux. Les vins de Charmail passent un cap et atteignent une qualité jusqu’alors inégalée.
2021Retour aux Sources
En 2021, la famille Goudet-Liquard, dirigée par Valérie Liquard et épaulée par son petit frère Vivien, a conclu un partenariat avec Bernard d'Halluin, apportant une connexion personnelle profonde au Médoc. Pour Valérie, il ne s’agissait pas seulement d’un investissement, mais d’un véritable retour aux sources. Ayant grandi dans les vignes du Médoc, elle a toujours rêvé de renouer avec la région qui a marqué son enfance. "C’est une affaire de cœur", a-t-elle expliqué. "Il y a quelque chose de si spécial à Charmail — ce n’est pas seulement la terre, mais l’histoire et l’avenir que nous y voyons. Revenir ici, faire partie de cela, c’est un rêve qui se réalise."
Ses enfants, Augustin et Bertille, partagent également cette connexion profonde. Tous les deux nés à Bordeaux mais ayant passé une grande partie de leurs vies aux États-Unis, ils ont toujours eu l'envie de renouer avec leurs racines françaises. Le Château Charmail leur a offert cette connexion. C’est un lieu où le passé, le présent et l’avenir de la famille se rejoignent, où leurs racines sont fermement ancrées dans le sol médocain.
“Nous avons la responsabilité d'honorer l'héritage de Charmail tout en veillant à ce qu'il continue de grandir et de prospérer pour les générations futures. Il ne s'agit pas seulement de faire du bon vin, mais de raconter l'histoire de cet endroit dans chaque bouteille.”
Valérie Liquard
Sur Les Chemins d’un Héritage...
Les Chroniques de Charmail
Le Château Charmail, situé au cœur de la Gironde, raconte l’histoire fascinante de deux seigneuries jadis rivales, Verdus et Bardis, dont les terres se rejoignaient autrefois pour former un domaine féodal prospère. Au XVIe siècle, la seigneurie de Verdus appartient à la famille Bonneau de Cansec, dont Jean de Bonneau de Cansec (1544-1606) et François de Bonneau (1620-1675) exercent des fonctions importantes au parlement de Bordeaux, ajoutant un prestige notable à leur lignée. Parallèlement, en 1612, la seigneurie de Bardis est vendue en réméré à Jean Trevey de Charmail, un écuyer et seigneur influent. Ce dernier, avec son goût pour la grandeur, établit la lignée des Trevey de Charmail, consolidant le nom qui marquera à jamais l’histoire de cette région.
Pendant près de deux siècles, la famille Trevey de Charmail règne sur Bardis, malgré les troubles et les intrigues politiques qui secouent parfois leurs terres. L’un de ses membres, Gabriel de Charmail, occupe le prestigieux poste de capitaine général garde-côte à Lamarque et commande les Dragons du Médoc, renforçant l’importance militaire et sociale de la famille. Cependant, la Révolution française marque un tournant tragique dans cette histoire familiale : Léonard de Paty du Rayet, époux de Françoise Hyacinthe de Trevey de Charmail et conseiller au parlement de Bordeaux, est condamné et guillotiné en 1795, entraînant la confiscation des domaines familiaux.
Malgré cette perte, la famille ne baisse pas les bras. Jeanne-Catherine, la veuve de Léonard, et sa sœur Marie, veuve de Jean-Robert Honorine Louvet, engagent des démarches pour récupérer les domaines de Bardis et Verdus. En 1828, après plusieurs années de lutte administrative, elles parviennent enfin à retrouver leurs terres, restituant ainsi aux descendants l'héritage ancestral.
Source : Inventaire du patrimoine (Région Nouvelle-Aquitaine, Gironde); Charles Cocks (Bordeaux, ses environs, 1850); Archives Maître Fabiani.
Les archives cadastrales napoléoniennes de 1831 témoignent d’une configuration remarquable des terres : Charmail, Verdus et Bardis apparaissent comme trois domaines distincts, chaque propriété marquée par des bâtisses imposantes et des parcelles bien définies. Le domaine de Charmail comprend alors une maison en pierre de taille, dotée d’une tour à l’angle nord-ouest et entourée d’un jardin et d’une petite parcelle de vignes. Une autre partie des bâtiments se rattache à Bardis, formant une cour intérieure protégée, délimitée par des dépendances en bois peint. Cette disposition singulière donne un caractère unique à l’ensemble du domaine, évoquant un équilibre entre résidence seigneuriale et exploitation viticole.
L'ouvrage de Cocks de 1850 décrit déjà le domaine de Charmail comme un acteur reconnu dans le monde viticole de Bordeaux, avec une production de 100 tonneaux, alors que Verdus, appartenant à Mme Bonneau, produit environ 45 tonneaux. Cette reconnaissance témoigne de la réputation grandissante de Charmail, qui attire l'attention des connaisseurs et contribue à l’aura de la région.
Source : Inventaire du patrimoine (Région Nouvelle-Aquitaine, Gironde); Charles Cocks (Bordeaux, ses environs, 1850); Archives Maître Fabiani.
En 1865, le domaine entre dans une nouvelle ère architecturale : une demeure imposante est érigée par le propriétaire de Verdus, M. Boyer. La demeure se distingue par son style élégant et ses détails finement travaillés. La façade principale, construite en pierre de taille, arbore une symétrie parfaite avec ses cinq travées et ses éléments décoratifs sophistiqués. La porte d'entrée, encadrée de moulures sculptées, est surmontée d’un fronton orné de motifs végétaux et soutenu par des consoles, ajoutant une touche de noblesse à l’ensemble. Sur la façade est, deux tourelles circulaires encadrent la bâtisse, conférant une allure à la fois royale et poétique à ce château du XIXe siècle.
À l'intérieur, chaque détail reflète le savoir-faire de l'époque, des plafonds hauts aux boiseries délicates, tandis que le parc arboré qui l’entoure renforce le charme intemporel du lieu. La fin du XIXe siècle marque le passage du domaine de Verdus à la famille Louvet de Paty. Ce transfert de propriété permet une extension et un renouveau pour Charmail, qui continue de prospérer sous la direction de la famille jusqu’au début du XXe siècle. En 1893, le nom de Bardis disparaît peu à peu, et le domaine se recentre autour de Charmail, sous la garde attentive de la famille Louvet de Paty.
Source : Inventaire du patrimoine (Région Nouvelle-Aquitaine, Gironde); Charles Cocks (Bordeaux, ses environs, 1850); Archives Maître Fabiani.
Ce n’est qu’en 1980 que le domaine entre dans une nouvelle phase de son histoire. Roger et Olivier Sèze, deux ingénieurs agronomes passionnés et visionnaires, acquièrent le Château Charmail. Bien conscients de l'héritage dont ils sont désormais les dépositaires, ils entreprennent de restaurer la grandeur du domaine tout en intégrant des pratiques modernes. Le chai, gravement endommagé par un incendie en 1975, est reconstruit, et les Sèze relancent la production viticole avec un soin méticuleux. Ils étendent les vignobles et intègrent des techniques agricoles novatrices, conférant ainsi à Charmail un équilibre subtil entre tradition et innovation.
Grâce à Roger et Olivier Sèze, le Château Charmail est désormais reconnu pour la qualité de ses vins et pour son attachement à un héritage viticole riche et profondément enraciné dans le terroir du Médoc. Sous leur impulsion, le domaine renaît, alliant l’élégance de son passé et les exigences du présent pour produire des vins de caractère, tout en respectant l’âme de ce lieu historique.
Source : Inventaire du patrimoine (Région Nouvelle-Aquitaine, Gironde); Charles Cocks(Bordeaux, ses environs, 1850); Archives Maître Fabiani.